Un témoignage poignant et bouleversant !!
15 octobre 2015 … Une photo aperçue par hasard sur Facebook, le cliché d’une bibliothèque secrète à Daraya et … « l’histoire » commence entre Delphine Miloui et Ahmad, puis viendra Ustez, Hussam, Shadi …
Une correspondance compliquée qui ne peut se faire qu’à travers internet … une mauvaise connexion souvent coupée … et souvent interrompue par les bombardements !!
Un bouleversant témoignage … des « Insoumis de Daraya ». Daraya cette ville Syrienne assiégée et bombardée durant 4 ans (2012/2016) par le régime de Bachar El Assad ...
Une ville qui dérange …
Des barils d’explosifs largués sur la ville, des centaines par jour sur une ville en plein blocus … isolée du monde …
p 13 « Quand toutes les portes se ferment à double tour, ne reste-t-il pas, justement, les mots pour raconter ?
Ecrire, c’est recoller des bouts de vérité pour faire entendre l’absurdité. »
Puis Ahmad raconte à Delphine Meloui, cette journaliste française, leurs vies … leurs quotidiens … leurs survis puis un jour dans les décombres ... des livres retrouvés pèle mêle … abandonnés … ensevelis … abimés …
Ils seront alors réparé … et comme un sursaut … une volonté de continuer à se battre … la décision de construire cette bibliothèque … une bibliothèque clandestine, cachée dans les sous sol, à l’abri des bombes mais à la disposition de la population restante
de Daraya … p 12 « Face aux bombes, la bibliothèque est leur forteresse dérobée. Les livres, leur armes d’instruction massive. »
Une résistance par les livres !! p 29
Puis Il y a Shadi … ce photographe qui passera ces 4 années à parcourir la ville, malgré les risques, à
filmer et à prendre des clichés … pouvoir capter et ne pas oublier tous ses moments forts et bouleversants de la ville et des habitants de Daraya …
Ce boitier qui un jour lui sauvera la vie !!
Enfin le 27 février 2016 … un cessez le feu … Daraya calme … silencieuse … mais pour combien de temps ??
Que dire de ce livre sinon qu’il bouleverse et interroge … Un récit Terrifiant !!
Une écriture efficace et sobre qui nous plonge vraiment dans les profondeurs de Daraya, de ses souffrances, de cette Absurdité humaine …
Un livre à partager et à faire découvrir !!! Impossible de rester insensible !!!
Malgré tout y a t-il un message d’espoir, une lueur ??

on blaguait en disant : pourvu que l’école s’effondre. Et elle s’est effondrée. »
p 11 « Ce cliché m’interpelle. Je l’ai découvert par hasard sur Facebook, à la page de « Humans of Syria », un collectif de jeunes photographes syriens. Je lis la légende ; elle évoque une bibliothèque secrète au cœur de
Daraya. Je répète à voix haute : une bibliothèque secrète à Da-ra-ya. Les trois syllabes s’entrechoquent. Daraya, la rebelle. Daraya, l’assiégée. Daraya, l’affamée.«
p 12 » je finis par retrouver la trace d’Ahmad Moudjahed, son auteur. Ahmad est l’un des cofondateurs de cette agora souterraine. A travers les mailles d’une mauvaise connexion internet, unique lucarne sur le monde extérieur, il me raconte
sa ville dévastée, les maisons en ruine, le feu et la poussière, et dans tout ce fracas les milliers d’ouvrages sauvés des décombres et rassemblés dans ce refuge de papier auquel tous les habitants ont accès. Des heures durant, il évoque en
détail ce projet de sauvetage du patrimoine culturel, né sur les cendres d’une cité insoumise. Puis il me parle des bombardements incessants. Des ventres qui se vident. Des soupes de feuilles pour conjurer la faim. Et de toutes ces lectures
effrénées pour se nourrir l’esprit. Face aux bombes, la bibliothèque est leur forteresse dérobée. Les livres, leurs armes d’instruction massive. (p. 12)
p 18 « Des petits, des grands, des cabossés, des écornés, des illisibles, des très rares, des très recherchés. Il faut désormais trouver un lieu pour les stocker. Les protéger. Préserver cette petite miette du patrimoine syrien avant qu’il ne parte en fumée. Après une concertation
générale, un projet de bibliothèque publique voit le jour. Sous Assad, Daraya n’en a jamais eu. Ce serait donc la première. « Le symbole d’une ville insoumise, où l’on bâtit quelque chose quand tout s’effondre autour de nous », précise Ahmad. »

p 29 « Les livres, un exutoire. Une mélodie de mots contre le diktat des bombes. La lecture, ce modeste geste d’humanité qui les rattache à l’espoir fou d’un retour à la paix.
A l’ombre de la guerre, les phrases peuvent de nouveau vibrer. Elles sont la marque du temps qui reste quand tout est condamné à disparaitre. Elles frémissent de tous ces mots, ceux de la
sagesse, de l’espoir, de la science, de la philosophie, qui résistent à la poudre d’explosif. Parfaitement ordonnés et classés sur les étagères, les mots sont solides, ils tiennent debout, triomphants,
résistants, vaillants, crédibles, empreints de vérité. Ils offrent des pistes de réflexion, des torrents d’idées, des histoires pour s’échapper. Le monde entier à portée de main.
Leur résistance par les livres est fascinante. »
p 31 « J’ouvre un dictionnaire. En vieux syriaque, daraya signifie « nombreuses maisons ». Quelle ironie de destin que de porter ce nom pour une cité dont les bâtiments sont aujourd’hui si peu nombreux à tenir debout. Parfois, la puissance des bombardements est telle
qu’elle creuse des cratères en plein milieu de la chaussée. »
p 43 « Bachar al-Assad avait fait le pari de les enterrer tous vivants. D’ensevelir la ville, ses derniers habitants. Ses maisons. Ses arbres. Ses raisins. Ses livres.
Des ruines, il repousserait une forteresse de papier.
La bibliothèque secrète de Daraya.«
p 98 « Je ne connais rien d’elles. Je les vois pas. Mais je les entends. Je les devine. Femmes au foyer, enseignantes, sages_femmes, activistes. Je devine leur détresse au quotidien. Je devine leur fatigue, les fausses couches,
les bébés prématurés, les serviettes hygiéniques qui viennent à manquer. Je devine le pipi au lit des enfants paniqués, les insomnies des mères trop agitées, les larmes dans l’obscurité. Tous ces malheurs qui
ne se disent pas, que la guerre étouffe, pour mettre en valeur la bravoure des combattants. Mais, derrière le triomphe des hommes, il y a aussi la souffrance au féminin.«
p 148 « Shadi a ouvert une sacoche qu’il portait en bandoulière. » … « Il en a extrait un objet qu’il a posé sur la table ; son appareil photo. Celui qui lui avait sauvé la vie. Je n’ai rien dit. J’ai regardé l’objectif carbonisé comme on observe un rescapé.
D’un geste lent, il a balayé la poussière qui recouvrait encore le boitier.
– Daraya était un symbole, a dit Shadi. Cet appareil en a été le témoin. Malheureusement, le monde entier nous a lâchés … »
Édition du Seuil
Genre : témoignage
Publié en 2017
Couverture : photo Ahmad Moudjahed, Dessin Abou Malek Al Chami
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