L’écume des jours … Boris Vian

Quel bonheur de découvrir « L’écume des jours » !!

Je pense que si je l’avez découvert il y a plusieurs années je ne l’aurai pas apprécié comme je l’ai apprécié aujourd’hui !!
Je découvre alors … Un conte fantastique, un roman passionné, une belle histoire d’amour, une satyre, une critique de la société, une « analyse » du monde du travail et une Philosophie de vie !!

Des moments surréalistes avec des personnages attachants, fantasques et fantastiques, des décors farfelus qui se transforment, une extravagante folie maîtrisée …
De la poésie, des mots qui font une sublime farandole !!
Ces petites souris au fil des pages dansant au rythme du pianocktail !! Telle une ritournelle !!
Jean Sol Partre et Simone de Bouvouard en invités « d’honneur » !!

La vie … les fleurs … la mort … le désespoir …
Un monde imaginaire et parfois si réaliste !!!

Il est très difficile de parler d’un mythe de la littérature française, de trouver les « bons » mots, d’ exprimer ses émotions et ses sentiments …
un grand respect qui intimide …
Quel sublime moment, un Enchantement littéraire …

« On se rappelle beaucoup mieux les bons moments, alors à quoi servent les mauvais? »

« J’ai le sentiment que toute ma vie dépend de cet instant précis. Si je le rate…
– Moi je pense le contraire. Si on rate ce moment, on essaie celui d’après, et si on échoue on recommence l’instant suivant. On a toute la vie pour réussir. »

« – C’est horrible, dit Colin. Je suis à la fois désespéré et horriblement heureux. C’est très agréable d’avoir envie de quelque chose à ce point-là. »

« Alise regarda Colin avec tendresse. Il était si gentil qu’on voyait ses pensées, bleues et mauves, s’agiter dans les veines de ses mains si fines.
…- Ne me remercie pas, dit Colin. Ce qui m’intéresse, ce n’est pas le bonheur de tous les hommes, c’est le bonheur de chacun. »

« Est-ce que, du point de vue moral, il est recommandable de payer ses impôts, pour avoir, en contrepartie, le droit de se faire saisir, parce que d’autres paient des impôts qui servent à entretenir la police et les hauts fonctionnaires ?
C’est un cercle vicieux à briser, que personne n’en paie plus pendant assez longtemps et les fonctionnaires mourront tous de consomption et la guerre n’existera plus. »

« Les souris de la cuisine aimaient à danser au son des chocs des rayons des soleils sur les robinets et couraient après les petites boules que formaient les rayons en achevant de se pulvériser sur le sol, comme des jets de mercure jaune. »

« La souris acquiesça.
– Suppose, pourquoi pas, qu’il ait une cousine ? Elle serait vêtue d’un sweat-shirt blanc, d’une jupe jaune, elle s’appellerait Al … elle s’appellerait Onésime.
La souris se croisa les pattes et parut surprise.
– Ce n’est pas un joli nom, dit Colin, mais toi tu es une souris et tu as bien de la moustache. Alors ? »

« – Il faut être raisonnable.
– C’est comme si deux bêtes se battaient dans ma poitrine, quand j’en prends une. Et puis ce n’est pas vrai, il ne faut pas être raisonnable.
– Il vaut mieux pas, mais quelquefois, il faut, dit Colin. »

« Colin possédait une fortune suffisante pour vivre convenablement sans travailler pour les autres, et Chick devait aller tous les huit jours au ministère voir son oncle et lui emprunter de l’argent car son métier d’ingénieur ne lui
rapportait pas de quoi se maintenir au niveau des ouvriers qu’il commandait, et c’est difficile de commander à des gens mieux habillés et mieux nourris que soi-même. »

« Ce que je veux dire, c’est qu’ils travaillent pour vivre au lieu de travailler à construire des machines qui les feraient vivre sans travailler.
– C’est compliqué, estima Chloé.
– Non, dit Colin, c’est très simple. Ça devrait, bien entendu, venir progressivement. Mais on perd tellement de temps à faire des choses qui s’usent.
– Mais tu crois qu’ils n’aimeraient pas mieux rester chez eux à embrasser leur femme et aller à la piscine et aux divertissements ?
– Non, dit Colin, parce qu’ils n’y pensent pas.
– Mais est ce que c’est leur faute si ils y croient, que c’est bien de travailler ?
– Non, dit Colin, ce n’est pas leur faute.C’est parce qu’on leur a dit : le travail, c’est sacré, c’est bien, c’est beau, c’est ce qui compte avant tout, et seuls les travailleurs ont droit à tout. Seulement, on s’arrange pour les faire travailler tout le temps et alors
ils ne peuvent pas en profiter.
Mais alors ils sont bêtes, dit Chloé.
– Oui, ils sont bêtes, dit Colin. C’est pour ça qu’ils sont d’accord avec ceux qui leur font croire que le travail, c’est ce qu’il y a de mieux. Ça leur évite de réfléchir et de chercher à progresser et à ne plus travailler. »

pianocktail

« Colin s’était assis par terre pour écouter, adossé au pianocktail, et il pleurait de grosses larmes elliptiques et souples qui roulaient sur ses vêtements et filaient dans la poussière. La musique passait à travers lui et
ressortait filtrée, et l’air qui ressortait de lui ressemblait beaucoup plus à « Chloé » qu’au « Blues du Vagabond ». »

« Chloé, vos lèvres sont douces. Vous avez un teint de fruit. Vos yeux voient comme il faut voir et votre corps me fait chaud… Il me faudra des mois, des mois, pour que je me rassasie des baisers à vous donner. Il faudra des ans de mois pour épuiser les baisers
que je veux poser sur vous, sur vos mains, sur vos cheveux, sur votre cou... Chloé, je voudrais sentir vos seins nus sur ma poitrine, mes deux mains croisées sur vous, vos bras autour de mon cou, votre tête parfumée dans le creux de mon épaule, et
votre peau palpitante, et l’odeur qui vient de vous. »

« A l’endroit où les fleuves se jettent dans la mer il se forme une barre difficile à franchir et de grands remous écumeux où dansent les épaves. Entre la nuit du dehors et la lumière de la lampe,
les souvenirs refluaient de l’obscurité, se heurtaient à la clarté et, tantôt immergés, tantôt apparents, montraient leurs ventres blancs et leurs dos argentés. »

« Il s’assit au bord du trottoir et pleura encore. Ça le soulageait beaucoup et les larmes gelaient avec un petit crépitement et se cassaient sur le granit lisse du trottoir. »

Publié en 1963

Genre : Conte, Roman

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