Un « délire social » ? Une maladie … La bipolarité ? Un questionnement … une introspection au fil des pages ? Une analyse sur la société ?
En tout cas un roman, une autobiographie qui bouscule …
L’auteur, journaliste à l’Humanité y aborde des thèmes forts !
Sa vision noire de la société … son combat militant, engagé et convaincu !! Et En parallèle Son malaise qui « enfle » dangereusement …
Cette « révolte sociale« , animal et viscéral qui va le conduire au bord du gouffre …
Il s’était pourtant juré, que l’HP, il n’y retournerait jamais !! p 25
Une plongée vertigineuse dans le quotidien des malades en hôpitaux psychiatriques … leurs souffrances … le regard des autres …
Une belle écriture … tranchante … précise … juste et efficace !!
Un rythme soutenu … et enivrant !!
Un récit effroyable … une sensibilité à fleur de peau … Un roman fort qui interroge …
mais malgré tout, des moments tendres, touchants ou une pointe d’autodérision apporte un peu de « légèreté » …
Un roman néanmoins plein d’espoir … et « très vivant »
Je me suis régalée et j’ai dévoré ce livre en quelques heures …

p 15 « Trois ou quatre personnes en blanc sont autour de moi. Elles me conduisent dans une grande pièce où il y a une fenêtre avec des barreaux, et un grand lit en croix avec des lanières.
La camisole.
La camisole.
Je comprends. D’un seul coup. Je comprends que je ne suis pas en enfer. Que je n’y ai jamais été. Que je me trouve à l’hôpital parce que je déconne à pleins tubes, en zinzin carabiné que je suis. »
p 18 « Faut que je me calme, sinon je vais devenir cinglé. Faut que je me calme, calme-toi, là, chut, arrête, maintenant, pose-toi, respire un peu, tu vas boire, ils vont revenir. « A boire! » Je hurle encore, pour la forme, pas trop fort.
Je les connais, ces enfoirés-là, s’ils croient qu’ils vont me faire le coup putain, mais combien, combien d’hosto j’ai fait ? Combien j’en ai hanté, de vos piaules camisolés, combien j’en ai cassé, de tronches aux infirmières, … »
p 25 « … jamais, jamais j’y retournerais. Et si j’y retourne, et s’ils m’y collent de nouveau, je les tuerai. J’en tuerai un, n’importe lequel, un infirmier, un couteau fauché dans le réfectoire, une fourchette bien plantée là, ta gueule, maintenant tu m’emmènes dehors, laissez-nous
sortir sinon je le massacre. Alors les sas s’enchaînaient, alors les murs s’ouvraient, les clés tournaient, encore, allez, jusqu’à la porte, la grande, la vitrée, celle de la rue, salut ! Je me tirais. Cinq minutes. Je me barrais de leur enfer en moins de cinq minutes, je m’arrachais à la très dure, tout, un otage et
et du sang plutôt que de replonger dans leurs infernales saloperies. »

grandira jamais plus que ça … Il restera là, il sera content. » …
… « Sequoia.
Sequoia sempervirens, avait précisé papa, ça me revient.
Encore vivant.
Je fixe l’épiphyte. »
p 31 « J’ai appris que l’alcool détruisait la conscience, construisait la violence, flinguait la libido, tuait des mômes sur les routes, tremblait les mains, secouait les bras. J’ai appris tous les viols, l’anorexie, ses perfusions, ses dégueulis. J’ai appris les suicides, aussi, les ponts
d’autoroutes, ça c’est ballot, on tombe sur les capots, les coups de flingue qui éraflent que la joue, les cordes qui pètent mais les vertèbres sautent, » … « J’ai appris les lacérations, flagellations, avalages de parfums, d’essence, scarifications, coups de tête contre les
murs, overdoses de cachetons. »
p 62 « Elle a décidé au bout de deux heures de faire un tour de classe, pour savoir ce que faisaient nos parents. Il y avait un tas de fils de profs de droit et d’avocats, quelques-uns de diplomates, d’ingénieurs et de directeurs généraux. » … » – Mon père est garde-chasse.
Il y avait eu un éclat de rire général et tonitruant.
Assis juste devant moi, Emile s’était retourné :
– Non, sans déconner … Il fait quoi, ton père ? » …
« Ils ne savaient pas , J’avais su, moi. Tout de suite. J’avais su que si je ne partirais jamais à la guerre, eux venaient de me la déclarer. Il ne s’agissait pas sur mon papa d’ une blague dont j’étais capable de sourire. C’était la guerre sociale, la pire, celle qui ne dit
jamais son nom, celle qui s’égrène en éclats de rire en mots d’esprit dans les salons. C’étaient leurs hôtels particuliers, leurs particules en enfilades, leurs tableaux de maîtres, » … « C’étaient leurs prestiges de dictionnaires qui écrasaient ma montagne.
J’engageais une lutte à mort.«
p 129 « … –Acceptez votre maladie, et ce qu’elle implique.
– Mais, c’est justement là que ça ne va pas, madame Ducis. Je me suis entièrement construit sur l’inverse, c’est-à-dire contre l’acceptation. Quand on milite,
c’est pour changer les choses. Donc ça suppose qu’on croie au changement, à la possibilité de la transformation, et qu’on ne fige rien en l’état. Qu’est-ce qu’on fait avec l’ordre social ? On l’accepte ?
Je le vomis, l’ordre social. Donc je me bats pour le transformer. »
On avait enterré le papet sur les berges de sa rivière, au pied du Serre-de-Barre. Je n’avais pas du tout compris dans l’église pourquoi le curé avait parlé pendant une heure et demie de Jésus, alors que c’était mon grand-père qu’on mettait au cimetière.
– C’est normal, Chichi. Ils sont complètement cons, les curés, m’avait renseigné papa.
Edition : La brune au Rouergue
Genre : Roman
Publié en 2017
Graphisme de couverture : Olivier Douzou
Illustration de couverture : Dorothy-Shoes, 2010
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