L’Amer Veille de Sébastien Monod

Un roman fort et émouvantétonnant et surprenant
Un monde rude … des personnages un peu rustres … et ses courriers tendres et teintées de féminité !!
On se laisse porter … bercer … tranquillement par cette belle et on pense « banale » histoire d’amour … faite de mots et de passion !!
et puis … « suspens » et interrogations et … plus rien n’est « banal » !!

Une déclaration d’amour .. « transparente » et pure … que l’on découvre au fur et à mesure des pages et du temps … Entre douceur … tendresse … déception … espoir …
et peut être désespoir

La découverte d’une époque … d’un lieu unique l’Ile d’Ouessant et de sa petite communauté… la vie des gardiens de phare … avec … Adrien dit
« le sauvage » un homme blessé et mystérieuxMaël l’ami sincère et discret … et Eugène rustre et révolté
On est aussi plongé dans Les années 30 … les années folles … les cheveux gominés et le borsalino … les coupes à la garçonne … avec Alice toute pétillante
Adrien l’artiste et puis la guerre qui éclate … Paris envahis !!

Une belle balade en Bretagne … un somptueux roman … avec toute l’ambiguïté de l’Amour … et de la passion …

Une belle écriture … une sensibilité à fleur de peau

Je n’ai pas été sensible à un précédent roman de Sébastien Monod « Anna t’aime » … mais je sentais que j’étais passé à côté de quelques choses et j’avais l’envie de
découvrir un autre roman de l’auteur !! et là … mon intuition était bonne !! Que de belles sensations !! Bonheur et plaisir !!!
Un beau roman à découvrir …. Une petite « Mer Veille » …

« Ne demande pas ton chemin à quelqu’un qui le connait car tu ne pourrais pas t’égarer »
Rabbi Nahman (1772-1810)

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p 22 « Je me demande si cette correspondance avec vous ne tient pas de la psychanalyse. Sans vous voir, sans vous savoir à mes côtés, je peux me confier, laisser libre
court à toutes mes pensées, sans frein, sans aucune censure. Ma main est un outil qui permet de retranscrire des idées qui viennent directement de mon âme.
Tout cela n’est pas réfléchi. Si cela l’était, si j’avais pleinement conscience des lignes que vous êtes en train de lire, elles ne seraient pas si authentiques, si nues. Car
c’est bien de cela dont il est question : je me déshabille devant vous. Mon cerveau est translucide, c’est moi, moi comme je ne me vois pas moi-même, que vous découvrez.
C’est mon cerveau que vous effeuillez, ôtant tous les pétales qui, par pudeur ou par convention, cachent mes sentiments. Toutes ces feuilles retirées, que restera-t-il ?
Une simple tige, quelques sépales, des étamines et le gynécée. Au bout de quelques lettres, je serai dénudée et sans charme, mais mon cœur, lui, sautera aux yeux. Vous ne verrez plus
que lui. Et c’est cela qui importe. Ce cœur diagnostiqué trop gros par les médecins a, par conséquent, besoin de beaucoup plus d’amour que n’importe quel autre. »

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p 42 « Comme j’aimerai être sur votre île. … Je crois que j’adorerais assister à une tempête ! Comme celles de romans de Jules Verne. Je me rends compte que j’ai utilisé le verbe « assister »;
j’imagine cela comme un spectacle, en réalité, cela doit être effrayant. La vie ne doit pas être calme et linéaire, elle se doit de comporter des moments plus violents, il faut le vent, il faut
la houle et l’impétuosité des sentiments pour apprécier la douceur du sable sous les pieds et la caresse des rayons du soleil sur la peau. »

p 57 « J’eus envie de rire, et ce rire d’ailleurs m’aurait fait le plus grand bien ! Je me pinçais alors pour qu’ils ne voient pas ma bouche se tordre. Enceinte ! Pour cela, il aurait fallu qu’il y ait un
contact entre mon promis et moi, chose que j’avais toujours écartée, différée, repoussée aux calendes grecques !
Pourquoi donc, vous demanderez-vous ? Je ne sais comment le dire … Faire la chose avec Arsène, cela eût été vous tromper un peu. Car, oui, je pensais à vous, le rêve de la veille le prouvait. »

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p 61 « Il (Adrien) n’avait jamais été gardien en mer, et ça, c’était le sujet qui fâchait. Tous les auxiliaires débutaient leur carrière en enfer – c’était ainsi qu’on nommait les phares en mer !
C’était le passage obligé : il fallait avoir vécu les situations extrêmes de vie en ces phares-là pour connaitre vraiment le métier. Ensuite, on demandait une mutation, car peu d’hommes, il fallait l’avouer, étaient faits pour cette existence-là. »

p 73 « Je lui avais foutu sa raclée, au petit Malgorn. Il a eu ce qu’il méritait. Eh quoi ? Défendre le « sauvage », quelle mouche l’avait piqué ? N’était-il pas des nôtres ? Bon, c’est vrai,
je ne l’ai pas raté. Les autres, ils m’ont dit que je devais mieux mesurer ma force, que je faisais le double du poids du gamin. C’est vrai. Disons qu’il s’agissait d’un avertissement.
S’il s’obstinait à causer à l’autre, s’il continuait à préférer sa compagnie à la nôtre, au moins il savait à quoi s’attendre. Bon sang, on ne se moque pas d’un Le Floc’h, famille honorable, gardiens de phare de père en fils depuis plus de soixante
ans !« 

p 73 « C’est à cette époque que Kernoa est devenu « le sauvage » à cette époque. Il s’est replié sur lui-même. Déjà qu’il était peu causant avant ! En 1940, la nuit est tombée et elle a duré plus que de raison ; les Boches
ont éteint tous les phares de l’île. La même année, une partie de la France a été placée sous le régime de Pétain, Ouessant n’a pas fait exception et est aussi passée sous l’administration de Vichy. Nous autres,
électromécaniciens, gardiens, maîtres de phare, avons été réquisitionnés, on était à la disposition des Allemands pour les différents travaux autour de la signalisation en mer.
Pas question de compter sur moi pour parler de cette période ! D’ailleurs aucun de nous n’en parlera jamais. Il est des évènements dont on préfère taire jusqu’au nom. L’oubli, oui, c’est ça. Ou plutôt tenter l’oubli.« 

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p 76 « Paris, 11 novembre 1939, Cher Adrien,
Cette année, nous ne commémorerons pas l’armistice de 1918, la fin des combats de la Première Guerre mondiale, la paix. Quand une nouvelle guerre a commencé, il ne peut être question de fête. Je vois à nouveau les hommes de mon
âge partir. Je leur dis « au revoir » tout en priant pour que ce ne soit pas un « adieu » déguisé. Je les embrasse fort et les serre dans mes bras, ma façon à moi de les retenir un peu plus longtemps quand eux y voient un encouragement,
une marque d’affection. »

p 99 « Je (Maël) pris place à ses côtés et posai la main sur son épaule. Une tape fraternelle. Virile. Un homme ne prenait pas un autre dans ses bras. C’était pourtant le geste qui aurait dû être fait. Je ne le fis pas. Je lui frottai énergiquement le dos, comme pour le réchauffer. Pourtant, il n’avait pas froid.
Il s’était habillé et la température dans la pièce était normale. C’était l’âme qui avait besoin de l’être, réchauffée. Adrien était glacé de l’intérieur. Une pierre cueillie dans les profondeurs du Fromveur, voilà à quoi il me fit penser, le voyant là, presque enroulé sur lui-même.
Que de souffrances contenues en cet homme. »

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p 148 « Je ne pris pas le chemin pour Bouguezen, mais poursuivis vers la pointe de Pern. Je croisais sur ma gauche l’aigle abandonné par les Nazis, cette roche monumentale qui ressemblait à leur emblème et qu’ils avaient décidé de voler. Hélas pour eux, la pierre
n’avait jamais voulu décoller. Ils l’avaient hissée sur une carriole qui avait fait quelques mètres avant de se briser. L’aigle demeure sur le bord du chemin de terre, sentinelle de pierre qui rappelle aux hommes qu’il faut toujours veiller à ne pas avoir de rêves trop grande.« 

p 157 « Le printemps ne va pas tarder à éclore. Autant je ne crois pas aux souhaits trop vite envolés du nouvel an, autant j’ai foi en ce renouvellement de la nature, de la vie. Lui
est réel, c’est du concret. Aucune déception à attendre de sa part ! »

Première rencontre avec l’auteur … au salon du livre d’Igoville … le 25 janvier 2015

Éditions Des deux Anges

genre : Roman

Publié en 2016

Illustration couverture : photo de Sébastien Monod

RENCONTRE avec l’auteur … Quelques questions pour tenter de découvrir qui se cache derrière le livre !!

Quel est votre premier écrit ? Votre premier texte ?
Cela date de Mathusalem ! À huit ans, j’ai créé un magazine. Je le confectionnais à partir de feuilles A4 que je découpais après les avoir pliées en quatre et que j’agrafais ensuite. On y trouvait des petites BD que je faisais et
des histoires autour des animaux, des sujets de mon âge. En grandissant, j’ai commencé à rédiger des reportages et à élargir les thèmes abordés : écologie, musique… et toujours des BD. Le point de départ de ma carrière de
journaliste (qui n’a duré que quatre ans) et mes premiers pas d’auteur. Adolescent, j’ai écrit entre cent et deux cents poèmes, puis des nouvelles et des romans. Je ne suis pas allé au bout du premier, mais du deuxième si ;
cependant il n’a jamais été publié et ne le sera jamais : c’est une œuvre de jeunesse, pleine d’erreurs inhérentes à un tel écrit. Mais il m’a permis d’affuter ma plume !
Votre plus beau souvenir de jeune lecteur ?
C’est L’Enfant et la rivière, un roman d’Henri Bosco. Un livre lu à l’école, mais je ne sais plus à quel âge. Ce roman m’a ouvert les portes d’un monde nouveau : j’ai découvert qu’il était possible de sortir du quotidien quand
celui-ci se révélait décevant ou en désaccord avec nos aspirations ou nos rêves. Dès lors, pour moi, ouvrir un livre signifiait partir, s’évader. J’étais comme ce jeune héros à m’imaginer des aventures quand d’autres ne voyaient
qu’une réalité sans intérêt : je sautais par-dessus des flaques qui étaient en réalité des torrents dangereux !
Le livre qui vous a « déstabilisé » ? et pourquoi ?
Oh, il y en a plusieurs ! Celui qui me vient à l’esprit en premier est Le Parfum. (Patrick Süskind) est très fort, car il parvient à nous rendre intéressant un personnage aussi commun et pour tout dire aussi laid que Grenouille.
Mieux que cela, il finit par nous paraître non pas sympathique, mais captivant. Cette proximité avec certains psychopathes ou assassins n’est pas isolée, on la retrouve aussi au cinéma ou à la télévision. Je songe au personnage
de Dexter dans la série du même nom. Le danger effraie autant qu’il attire !

Ecrire, vous donne l’illusion de quoi ?
L’écriture ne donne pas l’illusion, mais la certitude d’être en accord avec moi-même. Cela me permet de continuer à vivre dans ce monde découvert à l’âge de huit ans, dans lequel ce que j’imagine s’accorde à mes désirs.
Après mon premier texte publié, je me suis rendu compte que d’autres personnes aimaient ce que je créais, entraient dans mon monde, partageaient ma vision de l’existence. Ce ne fut pas une révélation, je l’avais eue plus tôt,
mais une confirmation que la littérature était mon domaine de prédilection, les mots mes meilleurs amis. Et les lecteurs mes confidents.
Quel est votre thématique, votre genre littéraire (polar, roman historique, …), ce qui vous inspire et pourquoi ?
Je ne pensais pas avoir de thématiques attitrées jusqu’au jour où l’on m’a fait remarquer que mes romans tournaient souvent autour des relations familiales. Plus largement, l’humain est au centre de mes écrits, et précisément la
place qu’il occupe dans la société. La question de l’identité est aussi très présente dans mes romans. Et même dans mes autres textes : dans mon essai sur Montgomery Clift (Éditions LettMotif), je montre à quel point les difficultés
rencontrées dans sa vie privée ont influencé ses choix de carrière.

Comme je suis un peu aventurier, j’aime bien explorer de nouveaux genres, ainsi je me suis récemment lancé dans le policier avec Nuit mauve (Cogito). Toutefois, je suis plus à l’aise dans la littérature blanche, la fiction qui s’inspire
du quotidien. Mais je ne suis pas un écrivain naturaliste pour autant (même si par exemple – un lecteur me l’a fait remarquer un jour – je détaille souvent ce que mangent mes personnages) : j’aime placer mes héros dans des situations
banales en y glissant une touche d’anormal pour créer un effet cocasse, voire burlesque.

Le spectre de mon inspiration est très large. Je puise mes sujets dans la vie réelle, parfois dans les faits divers. Et puis, il arrive qu’un roman naisse d’un détail : de paroles d’une chanson, d’une micro anecdote vécue… J’ai même écrit
un roman à partir d’une sensation, une odeur plus précisément, celle du Nil, mélange de boues et de gazole, pour Louxor Paradise (Jacques Flament Éditions) !
Question bonus !
Quel est votre relation aux livres ? Pour vous un livre « heureux » est un livre corné, annoté, souligné, déformés, … ou pas ?
Ah, pour moi, un livre, c’est sacré ! On ne le corne pas, on n’écrit pas dessus (sauf les livres pour les études, bien sûr). Pour légitimer les annotations ou le fait de corner les pages, certains disent qu’un livre est une chose vivante,
sous-entendant qu’il n’est pas figé et peut donc supporter des modifications. Mais l’homme aussi est une chose vivant ! Se permet-on de l’abîmer ? Bon, OK, certains se font tatouer la peau… Le débat est sans fin ! (sourire)

Merci Sébastien d’avoir accepté de répondre à ces quelques questions.

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